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LE DERNIER HÔTEL
Acte 2 | L'Envers de la Vie

Extrait du Roman Le Dernier Hotel

     On termine le dernier chapitre et on tourne la page. L’histoire est finie. On s’attend à des notes de fin de texte, une bibliographie, quelques remerciements peut-être. Délicatement apposés à l'encre noire sur le papier blanc. Comme un bouquet de chrysanthèmes. On est mort … Mais au moment de refermer le livre de notre vie, on découvre que ce n’est pas la fin ! Car un nouveau chapitre débute. Dans le Dernier Hôtel.

     Comment passer le temps dans un lieu où le temps n’existe pas ? Quel sens donner à nos existences lorsque l’avenir a disparu ? La plupart des morts se complaisent dans l’insouciance. Certains plongent dans les folles satisfactions du moment. D’autres se noient dans un océan de souvenirs. Pas moi. Je n’ai pas de passé auquel me raccrocher et mon présent est indéfini.

     Ma mémoire est une page blanche. Tout reste à révéler. Qui suis-je … et pourquoi ? Que raconte le livre de ma vie ? Fut-il même écrit de ma main ? Je suis coincé dans ce mystérieux chapitre, entre l’épilogue et le dos de couverture. Il me faut pourtant découvrir le récit. Retracer les pas parcourus. Reconstituer mon passé. Y trouver la clé de mon identité. Car c’est la clé de ma libération

 

***

     Une peinture géante tombe sur le parquet proprement ciré. La langue rose et le regard vif, un bouledogue s’en détache. Des gouttes de couleur aspergent son pelage noir. Version psychédélique. La toile trône dans une pièce sortie tout droit des années soixante. Le canapé de cuir blanc est confortable. Un tapis de grosse laine au poil géométrique donne au plancher des couleurs de printemps. Deux poufs oranges encadrent une lampe sur pied qui éclabousse les murs d’une lumière délicate. Sophia est assise derrière un bureau en frêne clair.

     Elle me sourit :

   « Je suis contente que vous soyez venu me voir, Frédéric. Vous vous sentez déstabilisé, c’est normal. Moi-même je l’étais en arrivant ici. C’est l’étrangeté du lieu, l’absence de repères. Pour certains, l’acceptation de leur nouvelle condition. Ça aide d’en parler et je suis là pour ça.

     – Par où commencer ?

     – Voulez-vous me parler de votre enfance ?

     – Non. Je ne me souviens de rien. Rien avant de mettre les pieds ici. »

     Elle réfléchit un instant. Caresse du doigt un livre, posé sur son bureau. Sur la tranche, on lit : Pluriel de Psychologie. En lettres d’or.

     « La mort, douce ou sanglante, est traumatique. Ce choc peut produire une amnésie : le cerveau et le cœur sont momentanément aveuglés. Mais l’amnésie dure rarement, Frédéric. C’est un état transitoire.

     – En attendant, ma mémoire est une prison sans murs ni barreaux ... Rien ne m’y retient, mais dans quelle direction aller ?

     – Le passé est la seule certitude. Pourquoi ne pas partir à sa recherche ? Après tout, vous êtes dans le Dernier Hôtel. Vous avez probablement de la famille parmi les résidents. Vos proches sauront, eux, qui vous êtes.

    – Encore faut-il pouvoir les trouver ! C’est un hôtel de fou : des milliers de chambres, pas de numéros ou de semblance alphabétique.

     – Il doit bien y avoir une logique à cette folie, Frédéric … et si quelqu’un la connaît, c’est le groom. »

Extrait du Roman Le Dernier Hotel

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